Trois fois la colère de Laurine Roux

Trois générations de femmes au Moyen-Âge, une même volonté d’émancipation, une seule vengeance, voilà les ingrédients d’une saga guerrière preste.

Dans la lignée médiévale des merveilleux “Fantaisies guérillères” de Guillaume Lebrun ou plus anciennement “Bastard Battle” de Céline Minard, Laurine Roux livre un récit de vengeance féminine et d’émancipation, qui se dévale comme un ruisseau dans les Alpes. Disons-le tout de suite, il n’y a pas dans ” Trois fois la colère” ni l’humour, ni la geste stylistique leste que développent Minard et Lebrun. Mais, ce récit à rebours est bien troussé, en quelques 199 pages, qui sont toujours sur le fil escarpé d’une narration rythmée par les péripéties, sans répit et donc sans longueur.

Tout commence avec l’égorgement en pleine bataille de Hugon, par sa petite-fille Miou. Hugon est le Seigneur de Bure, père de Reine, que Clarisse, sa femme légitime a fait enlever à sa véritable mère Gala. Et c’est toute la brutalité d’un homme qui ne vit que pour guerroyer qui décide du destin de ces femmes. Au fond d’Hugon, il n’y a rien que l’impunité d’être le maitre, l’absence de compassion autant que de foi et la bassesse de l’assouvissement de tout ce qu’il prend pour des désirs mais qui n’est que profond ennui. Et au centre, il y a l’injustice faite à Gala et son père qui sera exécuté, parce que trop tendre, trop peu dans les clous. C’est donc l’histoire de 3 femmes qui seront liées par le sang et la volonté de se faire justice et vengeance.

Au milieu, il y a des hommes, les frères que cela soit dans le sens de la lignée ou dans le sens monastique. Ils sont comme le père, tendres. Ils agissent avec amour et compassion. Alors, ils sont persécutés et exilés au sein de la forêt.

Parce que le centre, c’est cette forêt de Bénévent, qui fait si peur aux paysans et qui est pourtant si accueillante. Cette forêt dont Gala et son père connaissent tous les recoins, les bruits, les odeurs. Ils la respectent et elle les protège, parce qu’elle n’a rien contre les simples et les bienheureux. Là, Laurine Roux sait rendre sa plume sensible et même sensuelle.

Alors est-ce un conte féministe ? Peut-on y voir cette ode aux sorcières qui a envahi la sphère féministe depuis 30 ans ? L’intention de l’auteur semble être là, dans l’illustration des injustices, des sacrifices, que cette époque et tant d’autres ont imposé avec beaucoup plus de rudesse qu’aujourd’hui aux femmes. Mais c’est dans le péché capital de la colère que ces femmes trouvent leur salut. Révoltez-vous !

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *