Avouons qu’en anglais, le pissenlit a plus de mordant et de classe : dandelion. Littéralement, dents de lion, en référence à ses feuilles dentées et sans doute aussi à sa puissance, sa résistance. Alors, pourquoi avoir choisi ce fameux pissenlit comme identité ? Pourquoi lui avoir accolé la belle hirondelle ? Allongez-vous ma brave dame, on va causer ….
Dans le questionnaire de Proust, à la question “quelle fleur seriez-vous ?”, je répondrai sans hésiter : le pissenlit. Parce que j’ai une petite vessie ? Oui, mais pas que. Parce que ma couleur préférée est le jaune, le jaune franc, le jaune du soleil méditerranéen, le primaire qui crée la lumière. Je suis, depuis peu, absolument photosensible. Je dépéris sans lumière.
Pourquoi le chic Dandelion ? Parce que j’ai les crocs. Je suis rêche et amère sous la langue parfois mais tellement bonne pour la santé, tout est bon chez moi maintenant, de la racine qui s’agrippe aux fleurs qui sont liqueur . Et comme le pissenlit , je peux continuer à pousser n’importe où, n’importe quand, je survivrai et pire … Je me disperserai , je ferai des petites graines en fractales, que j’enverrai partout au grès des vents. Je résisterai à tout et l’on fait même des voeux en me soufflant dessus, parce qu’après tout, je peux être magique.
J’ai les crocs donc et j’ai envie à nouveau. Elle est revenue, comme une vieille amie retrouvée, qui ne s’en va jamais tout à fait et qui laisse l’éclat de son mois de mai, tout au long de l’année (oui, c’est du Francis Lemarque).
L’hirondelle fait le printemps. Pour moi, elle a toujours été le symbole de la vie joyeuse, la vie que l’on croque, que l’on aime. Ce petit oiseau, si fragile et si rude, qui parcourt sans s’épuiser des kilomètres de migration, noir et blanc mais tellement gai dans ses pépiements, est non seulement lié à mon enfance et à ses heures à les regarder nicher au-dessus de nos fenêtres mais reste le symbole de ce que je veux dans ce nouveau chapitre de ma vie : Vivre, Penser et Disperser notre Printemps.
Penser Printemps, avec les majuscules de l’exigence et celle de l’ancrage dans l’Idée comme dans la Terre. Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire pour moi Penser Printemps ?
Spoiler alert : Cela n’a rien et n’aura jamais rien à voir avec Manu 1°.
Penser Printemps, c’est ce que je me souhaite, ce que je vous souhaite, tous les jours, depuis bientôt trois ans. Depuis le 20 septembre 2022, le jour où mon monde entier a changé. Le jour où mon père est mort. Nous l’avons enterré sous un soleil radieux, le jour de la Saint Michel, sa fête, entourées de tous ces gens qui l’ont aimé, qu’il a soigné, avec qui il a été un gentil homme, chantant tous en coeur “L’Auvergnat” de Brassens pour l’accompagner, là où il mangera les pissenlits par la racine. Penser Printemps, c’est ce que peu de temps avant sa mort, il m’avait souhaité, avec ses mots à lui, d’aveyronnais pudique et de père aimant. J’ai commencé par le tatouer sur mon avant bras : des hirondelles et des pissenlits.
Penser Printemps, c’est une volonté et un choix ” de se réveiller soi-même” comme dit Alain. ” Bonne nouvelle oui ; mais qui doit enfin toucher terre” dit-il. Voilà donc ma volonté, pour ce nouveau chapitre de ma vie, celui où l’on est seul, véritablement, sans protection autre que sa capacité à s’émerveiller de la nouveauté, accepter la surprise, pleurer les joies et sourire aux pertes, avoir assez de souvenirs pour en faire des liens aux autres et avancer en doutant de tout, sauf de soi. C’est une fleuraison et le parfum des fleurs doit être partagé pour créer un monde.
Alors, j’ai à nouveau décidé de partager, d’essayer de transmettre, aux yeux de tous et de personne. Et je vous souhaite de Penser Printemps avec mon nouveau moi.